Franchise et Brésil

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Flore Sergent et Homa Homayounian du cabinet Simon & Associés font le point sur la franchise au Brésil.

Le Brésil, pays à l’honneur lors de l’édition 2009 du salon Franchise Expo Paris, attire encore (trop ?) peu de réseaux Français : selon l’enquête effectuée par la Fédération Française de la Franchise (FFF), en 2010, seuls 3 % des franchiseurs français ont implanté leur réseau au Brésil. L’évolution économique que connaît actuellement le pays est néanmoins susceptible d’inciter une part grandissante de réseaux à s’y développer (I). Nous reviendrons également sur la place toute particulière qu’y occupe la franchise, qui fait l’objet d’une politique de développement (II) et le cadre juridique dans lequel elle évolue (III).

I. CONTEXTE ECONOMIQUE

Le Brésil, République fédérale regroupant 26 Etats fédérés et un district fédéral (où se situe la capitale politique et administrative, Brasilia), est le cinquième pays du monde par sa population et la huitième économie mondiale (classement 2010).

Le Brésil est aujourd’hui classé, avec la Chine, la Russie et l’Inde, parmi les géants émergeants, formant avec ces trois pays l’acronyme 'BRIC'.

Le secteur des services représente la plus grande partie de son économie (68,4 %), l’industrie le quart (25,4 %) et l’agriculture 6,2%.
Après avoir subi les effets de la crise mondiale (baisse du PIB de 0,6 % en 2009), l’économie Brésilienne a renoué avec une forte croissance dès 2010 (7,5 %). Les perspectives du FMI pour 2011 prévoient encore une croissance appréciable à 4,5 %.

La ville de Sao Paulo, ville la plus peuplée et la plus riche du pays, est la quatrième métropole mondiale, la plus grande ville de l’hémisphère sud et le principal centre financier, commercial et industriel d’Amérique latine. La capitale politique du pays est Brasilia, fondée en 1960.

La France et le Brésil entretiennent des relations diplomatiques privilégiées et ont adopté un partenariat stratégique concernant tous les secteurs (politique, culturelle, scientifique et technique).

Le Brésil est le premier partenaire commercial de la France en Amérique du Sud.
Plus de 400 entreprises françaises – dont 35 entreprises du CAC 40 – sont implantées au Brésil. En matière d’investissements directs étrangers, la France est le cinquième partenaire du Brésil ; en 2009, les flux d’investissements directs français vers le Brésil se sont élevés à 3 milliards de dollars.

II. POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT DE LA FRANCHISE

La franchise est apparue au Brésil dès les années 1960 et s’y est développée de façon significative à partir des années 80.

Cependant, il faut bien le dire, c’est surtout au cours de la dernière décennie, et plus particulièrement des quatre dernières années que le secteur a connu un développement important.

Selon les chiffres relevés par l’Association brésilienne de la franchise (Associação Brasileira de Franchising – ABF) le nombre de réseaux de franchise a triplé entre 2001 et 2010, et augmenté de plus de 83 % entre 2006 et 2010. Cet essor s’explique en grande partie par le développement considérable des centres commerciaux au Brésil, occupés à 70 % par des points de vente franchisés.

Le secteur de la franchise s’est doté d’une association pour promouvoir ses intérêts, l’Associação Brasileira de Franchising – ABF, qui a été créée en 1987, et est membre du World Franchise Council. A l’instar de nombre de ses équivalents dans le Monde, cette association a adopté un code de déontologie de la franchise.

  • Les chiffres

Le secteur génère un chiffre d’affaires de plus de 20 milliards de dollars et est classé 6ème marché de la franchise au plan mondial.

En 2010, la franchise regroupait 1.855 réseaux, contre 1.643 en 2009, soit une augmentation de 212 réseaux en seulement un an.

Le nombre de magasins exploités en franchise a également augmenté, (79.988 unité en 2009 à 86.365 en 2010). Cette augmentation a été particulièrement importante dans les secteurs de l’alimentation (+39,9 %), des accessoires et chaussures (+29,9 %), du vêtement (+29,0 %) et de l’ameublement-décoration (27,4 %).

La ville de Sao Paulo concentre à elle seule la majorité (56,9 %) des sièges sociaux de franchiseurs, Rio de Janeiro en regroupant 13,4 %. Sao Paulo et Rio de Janeiro comprennent également à elles deux près de la moitié des établissements franchisés, implantés respectivement à 37,6 % et 12,2 % dans ces Etats.

Les 6 Etats formant le sud-sud-est du pays (Sao Paulo, Rio de Janeiro, Minas Gerais, Parana, Rio Grande do Sul et Santa Catarina) concentrent près de 90 % des franchiseurs et des trois-quarts et des franchisés.

  • International

Les réseaux implantés au Brésil sont en grande majorité (89 %) d’origine brésilienne. 6 réseaux français y sont implantés.

Selon Ubifrance, la forte augmentation du pouvoir de consommation de la population brésilienne et la bonne réputation dont jouissent les produits français offre de véritables opportunités aux réseaux français, surtout en matière de biens de consommation. L’organisation de Franchise Expo Paris indique qu’il existe notamment une demande en matière de boulangerie.

On dénombre actuellement 65 réseaux brésiliens s’exportant, ce qui représente environ 4 % des réseaux du pays. Parmi ceux-ci, 3 sont implantés en France. Si le taux de réseaux brésiliens s’exportant est actuellement relativement faible, le phénomène s’intensifie.

III. LE CADRE JURIDIQUE

Le régime juridique de la franchise relève de la compétence législative des Etats fédérés.

Aussi la franchise est-elle soumise à des règles différentes selon l’Etat d’implantation.

A ce jour, seules certaines provinces ont légiféré en matière de franchise ; les provinces d’Alberta, d’Ontario, de l’Ile du Prince Edouard et du Nouveau Brunswick. Cependant, un projet de loi est en cours d’élaboration au Manitoba. Une des difficultés majeures réside dans les écarts existant d’un Etat à l’autre quant à la définition de la franchise. Cependant, malgré les disparités, la notion de franchise comprend dans tous les états la notion française de la franchise au sein d’une conception plus large.

  • L’information précontractuelle

La loi du 15 décembre 1994 relative au contrat de franchise impose au franchiseur de fournir au candidat franchisé un document d’information pré-contractuelle dont le contenu, sans être exactement identique à ce qui est exigé en France par l’article R. 330-1 du code de commerce, est, à l’instar de la législation de nombreux pays, en grande partie similaire au texte français.

Le document doit ainsi contenir notamment :
- des informations relatives au franchiseur et aux entreprises qui lui sont liées (nom ou raison sociale, nom commercial, adresse, bref historique) ;
- les bilans et comptes relatifs aux deux dernières années ;
- une description des litiges en cours et auxquels le franchiseur, son master-franchiseur ou le titulaire des droits de propriété intellectuelle est partie, susceptible d’avoir une incidence sur la franchise ;
- une description du profil requis du franchisé en matière de qualités, de formation et d’expérience ;
- l’exigence d’implication directe du franchisé dans l’exploitation ;
- une description des investissements requis pour le démarrage de l’activité sous franchise ;
- une description des obligations financières du franchisé ;

- une présentation du réseau et des franchisés qui en sont sortis au cours des 12 derniers mois ;
- une description des droits et obligations du franchisé relativement à son territoire ;
- une description des obligations du franchisé en matière d’approvisionnement ;
- une description des services fournis au franchisé ;
- une description du statut des marques et brevets auprès de l’Institut national de la propriété industrielle ;
- une description des obligations post-contractuelles du franchisé relativement au savoir-faire et à la concurrence ;
- le contrat type, y compris ses annexes, et éventuellement le précontrat.

Le document doit être remis 10 jours avant la signature du contrat de franchise.

L’information incomplète ou erronée entraîne, à la demande du franchisé, l’annulation du contrat, la restitution de toutes les sommes perçues par le franchiseur et des dommages intérêts.

  • Exécution et extinction du contrat

Bien que la définition du contrat de franchise n’envisage la transmission du savoir-faire qu’à titre optionnel, la franchise type comprend une telle transmission ; ainsi, sur les 1.200 réseaux de franchise implantés au Brésil en 2008, 1.020 reposaient sur la mise à disposition d’un savoir-faire.

Le contrat prévoit ainsi, la plupart du temps, à la charge du franchiseur, des obligations similaires à celles existant en France : mise à disposition de droits de propriété intellectuelle, transmission d’un savoir-faire, fourniture d’une assistance, approvisionnement et, éventuellement, exclusivité territoriale.

Le franchisé verse quant à lui, notamment, un droit d’entrée et une redevance au franchiseur. Après l’extinction du contrat, il peut se voir imposer une obligation de non-concurrence.
Le contrat de franchise peut être enregistré auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) et est alors opposable aux tiers.

  • Marque

La marque brésilienne est enregistrée auprès de l’INPI brésilien (Instituto nacional da propriedade industrial).

Le signe enregistré en tant que marque doit revêtir un caractère distinctif et ne pas contenir de terme au caractère publicitaire trop marqué.

Le déposant étranger doit désigner un mandataire qualifié au Brésil faute de quoi l’enregistrement risque d’être révoqué.

La marque est déchue à la demande de tout intéressé si elle ne fait pas l’objet d’un usage pendant cinq ans.

L’enregistrement de la marque, valable 10 ans, est indéfiniment renouvelable par périodes successives de 10 ans.

Le Brésil est signataire de la Convention de Paris mais n’est pas membre du système de Madrid. Il n’est donc pas possible d’enregistrer la marque brésilienne via l’enregistrement international.

Bien que n’étant pas partie à l’Arrangement de Nice, le Brésil a pour politique d’adopter une classification des produits et services compatible avec la classification de Nice.

  • Disposition particulière aux investissements étrangers

Dans la plupart des secteurs d’activité, le capital d’une entreprise brésilienne peut être détenu à 100 % par un investisseur étranger ; conformément à ce qui a été indiqué plus haut, le dirigeant d’une société détenue à 100 % par des investisseurs étrangers devra, comme le dirigeant de toute société brésilienne, être domicilié au Brésil.

Les sommes investies au Brésil doivent être enregistrées auprès de la Banque centrale du Brésil (BACEN).

 

Flore Sergent, Avocat et Homa Homayounian, Juriste, Simon & Associés


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