Noëlle Lenoir, Associée, Kramer Levin Naftalis & Frankel LLP

Interviews
Outils
TAILLE DU TEXTE

Noëlle Lenoir - Avocate Associée - Kramer Levin Naftalis & Frankel LLPLe Monde du Droit a rencontré Noëlle Lenoir, nouvelle associée spécialisée en droit de la concurrence et droit public des affaires du cabinet Kramer Levin Naftalis & Frankel LLP.

Qu'est-ce qui vous a poussé à rejoindre Kramer Levin Naftalis & Frankel LLP ?

C’est d’abord l’excellente réputation de ce cabinet qui m’a incitée à rejoindre Kramer Levin avec mon équipe de trois avocats : Eric David, Anne Fontanille et Hubert Dunoyer de Segonzac. Kramer Levin est très connu à New-York.

Lorsque j’enseignais à la faculté de droit de Columbia (en 2001), j’en entendais souvent parler car beaucoup d’avocats du bureau de New-York, étant des anciens de Columbia (des alumni), avaient des contacts avec les professeurs de droit de Columbia que je côtoyais et dont certains sont devenus, d’ailleurs, de proches amis.

Par ailleurs, le bureau de Paris est également de très haut niveau et l’atmosphère qui y règne est extrêmement chaleureuse grâce notamment à Alexander Marquardt, managing partner hors pair. C’est d’autant plus rassurant que, comme vous le savez, il est très important de pouvoir échanger entre confrères d’un même cabinet sur nos expertises et sur nos pratiques. Ces échanges sont un enrichissement permanent indispensable particulièrement utile à nos clients.

Pour être complète, je dois signaler que Kramer Levin dispose d’une expertise presque unique à Paris dans le domaine du droit bancaire et financier; ce dont témoigne l’arrivée récente d’Hubert de Vauplane, ancien directeur juridique de Crédit agricole SA qui a rejoint Jean-Pierre Mattout, ancien directeur juridique de BNPParibas. Or il se trouve que j’ai parmi mes clients un certain nombre d’établissements financiers et que je me suis investie dans ce secteur, que ce soit en matière de concurrence et aides d’Etat ou sur le plan de la régulation.

Pouvez-vous nous décrire votre parcours ?

Jusqu’à mon entrée au barreau voici quelques années, ma carrière s’est déroulée dans le public. Je ne le regrette nullement. J’ai eu la chance d’exercer des fonctions variées, avec comme fil conducteur le droit.
Pour reprendre la fameuse trilogie des pouvoirs – le législatif, l’exécutif et le judiciaire – je peux dire que j’ai exercé des fonctions à ces trois niveaux :

- Au niveau du législatif, d’abord, mes fonctions d’administrateur au Sénat, affectée à la Commission des lois, m’ont permis au tout début de ma carrière de participer à la confection de la loi. J’ai adoré les séances de nuit du Sénat où se jouaient les derniers arbitrages sur les textes, après des Commissions mixtes paritaires Sénat/Assemblée nationale parfois houleuses.

- Au niveau de l’exécutif, j’ai eu la chance de travailler tant dans une autorité administrative indépendante – la CNIL en l’occurrence – qu’au niveau gouvernemental comme directeur de cabinet à la Justice, chargée de mission auprès du Premier ministre, et bien sûr ministre aux Affaires européennes.

- Enfin, c’est le judiciaire qui m’a rattrapée, étant d’une famille de magistrats et avocats depuis des générations. Le Conseil d’Etat, le Conseil constitutionnel et maintenant le barreau sont des lieux où le droit se fait, se discute, se transforme. Ces fonctions laissent place au débat, et c’est ce qui est passionnant.

J’aime également l’enseignement. Je suis heureuse d’avoir pu non seulement enseigner en France (IEP de Paris, facultés de droit de Paris, HEC), mais aussi à l’étranger (UCL à Londres et Columbia à New York). J’ai des souvenirs formidables de mes quelques mois passés à la faculté de droit de Columbia dont le modèle devrait inspirer sous certains aspects d’ailleurs nos universités françaises.

Active tant en droit public qu'en droit privé, aux rôles multiples, quelles fonctions avez-vous préféré exercer jusqu'ici ?

Je ne souhaite pas introduire une notion de hiérarchie entre les différentes fonctions que j’ai exercées, pas plus que je ne peux faire de comparaison entre ces fonctions et les fonctions internationales que j’ai occupées telles que la Présidence du comité d’éthique européen auprès du Président de la Commission européenne, ou encore la Présidence du Comité international de Bioéthique de l’UNESCO.

Je n’ai cessé d’aimer ce que je faisais. C’est une grande chance pour moi de n’avoir jamais cessé d’apprendre dans ces fonctions tout au long de ma vie. J’ai pu ainsi me renouveler et me remettre en question à chaque fois.

Si j’avais à choisir, néanmoins, je dirai que mes passages au Conseil constitutionnel et au ministère des Affaires étrangères m’ont beaucoup marquée.

Quel est votre meilleur souvenir dans votre carrière ?

Je n’ai pas un, mais un certain nombre de « meilleurs souvenirs ». En effet, j’ai connu plusieurs fois des temps particulièrement forts dans ma carrière.

Parmi ceux-ci, je peux citer les débats auxquels j’ai participé en tant qu’administrateur au Sénat sur la loi « Sécurité et Liberté » en 1980, certaines séances épiques de discussion au Conseil constitutionnel sur certaines lois ou sur les traités européens comme celui de Maastricht en 1992, année de mon arrivée au Conseil.

J’ai également éprouvé une grande émotion quand les pays sortant du bloc soviétique ont rejoint l’Europe en 2004. Je garde enfin un souvenir indélébile de mon entrée au Conseil d’Etat, où je rêvais d’entrer, et qui reste pour moi un haut lieu de formation à la rigueur juridique.


Qui a le plus influencé votre carrière ?

C’est le modèle de mes parents qui influence le plus ma carrière. Mon père et mon frère étaient avocats. Leur sens du travail, de la rigueur et de l’éthique est pour moi un guide.

De grands juristes comme Guy Braibant et Bruno Genevois, conseillers d’Etat, m’ont aussi beaucoup apporté. Jacques Fauvet lorsqu’il était président de la CNIL m’a également magnifiquement conseillée. Enfin, je ne peux oublier que j’ai été nommée au Conseil constitutionnel et au gouvernement à l’initiative respectivement de François Mitterrand et Jacques Chirac.


Au vu de votre parcours, vos compétences s'avèrent multiples. Sur quels secteurs souhaitez-vous désormais vous concentrer ?

Avec mon équipe, je concentre mon expertise sur le droit de la concurrence national et européen (antitrust et concentrations), y inclus la problématique des aides d’Etat dans laquelle nous avons une vraie spécialité.

Compte tenu de la connaissance que j’ai de l’intérieur du fonctionnement de l’Union européenne et des contacts que j’ai noués à la Commission européenne, il est évident que je me suis aussi investie dans le conseil sur les régulations européennes dans divers domaines, dont celui, comme je l’ai dit, de la régulation financière.

Enfin, nous sommes spécialisés en contentieux en particulier européen devant la Cour de Luxembourg, mais aussi devant les juridictions nationales.

Qui conseillez-vous ?

La palette de nos clients est très variée et c’est ce qui fait l’intérêt de notre travail. Nous conseillons aussi bien des multinationales dans différents secteurs que des entreprises familiales non cotées, mais aussi des instituts de recherche, des fédérations professionnelles ou encore même des agences de l’Etat.

Le point commun de notre pratique, c’est que nous tenons avant tout à instaurer des relations de confiance qui sont la clé de l’efficacité de notre métier. Nos clients sont extrêmement fidèles, ce qui pour nous est une grande satisfaction.

Quels sont vos objectifs pour ce cabinet ?

Mes objectifs sont les mêmes que ceux de mes confrères de chez Kramer Levin : offrir le service juridique du plus haut niveau possible en mobilisant nos connaissances, notre savoir-faire ainsi que notre capacité de construire des raisonnements suffisamment étayés et convaincants. Je dois dire que la qualité de mes collaborateurs est un véritable atout de ce point de vue, et c’est particulièrement gratifiant pour moi d’animer ainsi une équipe de jeunes avocats intelligents et compétents.

Cela étant, j’aimerais pouvoir apporter au cabinet en dehors du fruit de mon expérience multiple, un développement accru dans certains secteurs industriels stratégiques comme les télécommunications, l’énergie, la pharmacie, ou encore les transports de toutes sortes. La France a de magnifiques entreprises et les aider dans leurs stratégies de croissance, qui supposent d’être appuyées sur de solides bases juridiques, est très motivant.