Elections ordinales Paris 2020 : interview de Rémi-Pierre Drai et Sandra Ammar

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Le Monde du Droit a interrogé Rémi-Pierre Drai et Sandra Ammar, candidats au Conseil de l'Ordre du barreau de Paris pour le mandat 2020-2022.

Pourquoi vous présentez-vous ?

Rémi-Pierre Drai : Je vais éviter la langue de bois et la réponse bateau. La vérité est que j’adore ce métier. En ratant l’ENA il y a 32 ans, je pensais avoir raté ma vie. En réalité, j’exerce certainement l’un des plus beaux métiers du monde. D’abord, pour peu qu’on arrive à en vivre, ce métier donne une liberté considérable. Quand je vois des avocats qui en ont marre de ce métier, des avocats qui jettent l’éponge, des avocats qui n’en peuvent plus de courir après le client, des avocats qui font valoir leur droit à la retraite alors qu’ils n’ont pas même 30 ou 35 ans de cotisations, je me dis qu’il y a un vrai problème, à la fois à l’entrée dans la profession et pendant les différentes phases de la profession, celle où on est collaborateur puis celle où l’on devient patron ou associé d’une structure. J’ai donc envie d’apporter mon expérience au service des confrères.

Sandra Ammar : Pour être également honnête et transparente, jamais je n’aurais pensé me lancer dans cette aventure si Rémi-Pierre ne m’avait pas expliqué à quel point on peut rendre service en étant l’élue de ses pairs. Jusqu’à présent, je pensais que le Conseil de l’Ordre était essentiellement « le gendarme de la profession », avec des rappels à la loi et de temps en temps le risque d’une procédure disciplinaire. J’ai découvert que le Conseil de l’Ordre, c’est tellement plus que ça. Parallèlement, je me suis engagée, il y a plusieurs années, au sein de Zen Prud’hommes. J’ai appris à écouter les confrères, à trouver ensemble des solutions et à créer un lien constructif à l’enrichissement de notre profession. Cela m’a donné envie de consacrer plus de temps et de m’engager bien plus encore au service de la profession, surtout dans ce contexte de crise sanitaire éprouvante. L’idée d’apporter ma voix au sein du Conseil, celle d’une avocate qui a été collaboratrice, puis celle d’une avocate à son compte et en individuel qui mène à la fois la gestion de son cabinet et l’éducation de deux jeunes enfants de 6 et 10 ans.

Quels sont les principaux axes de votre programme ?

Réponse commune : Si on veut être heureux dans ce métier, il faut tout d’abord pouvoir en vivre convenablement. Or, beaucoup d’entre nous ne savent pas trouver des clients ni les facturer. On ne nous apprend pas véritablement à être un chef d’entreprise. Trop nombreux sont les avocats qui confondent chiffre d’affaires et résultat de l’entreprise. Un cabinet d’avocat est une entreprise, il doit être géré avec rigueur. Le cabinet doit constituer de la trésorerie pour les périodes difficiles. Il faut également et c’est le pendant d’une bonne gestion, qu’un cabinet d’avocat puisse recouvrer ses honoraires facilement. Or, de toute évidence, nombreux sont les avocats qui renoncent à leurs honoraires à partir du moment où leurs clients tardent à les payer, rechignent à le faire ou tout simplement les contestent. Le cabinet d’avocat, comme une entreprise, doit pouvoir avoir une décision rapide, efficace, exécutoire. Or, actuellement, à Paris, il est possible d’attendre jusqu’à 8 mois devant le Bâtonnier puis jusqu’à 3 ans devant la Cour d’appel pour obtenir une fixation des honoraires et enfin un titre exécutoire. Nombreux de nos confrères font face à de réelles difficultés qui mettent en péril leur exercice de la profession. Ce n’est pas une réforme qu’il faut faire sur ce sujet, c’est une révolution.

Pour résumer, la gestion du cabinet d’avocat, sa pérennité sont un des fils conducteurs de notre campagne.

Notre projet tient en 3 mots : Écouter, servir et défendre ...les avocats parisiens.

Quels dysfonctionnements observez-vous au sein de l’Ordre et que proposez-vous comme solutions ?

Rémi-Pierre Drai : Nous ne parlerons pas de dysfonctionnements mais plutôt d’améliorations. Nous avons des coups de cœur, mais également nos coups de colère. Nous pensons au nouveau Palais de Justice où nous avons plus l’impression d’être des badauds en perdition que des auxiliaires de justice. Il faut que les avocats soient plus respectés, pour que l’on n’ait plus à jeter nos robes par terre.

Sandra Ammar : Il faut également que l’Ordre véhicule une image plus positive, qu’il ne soit plus perçu comme une Épée de Damoclès au-dessus de nos têtes, mais comme un Ordre conciliateur, fédérateur, aidant les confrères à se former, à progresser, à être défendu et entendu.

Qu’avez-vous de plus que les autres candidats ?

Réponse commune : Pour être honnête, nous n’en savons rien. Chaque candidat à sa particularité.

Rémi-Pierre Drai : J’ai déjà été membre du Conseil de l’Ordre de 2006 à 2008, c’est-à-dire dans la même promotion qu’Olivier COUSI, Bâtonnier de l’Ordre et Olivier LAGRAVE, Secrétaire Général de l’Ordre. La campagne que nous faisons avec Sandra est très étrange. Nous n’avons pas eu beaucoup d’occasions de rencontrer les autres candidats. C’est essentiellement une campagne virtuelle qui perd beaucoup en humanité et en confraternité. Ceci étant, nous avons l’un et l’autre les pieds sur terre, nous avons l’un et l’autre créé nos propres cabinets. Pour ma part, j’ai créé mon cabinet avec ma femme en 2008 et nous sommes aujourd’hui 15 avocats sur 3 sites différents (Paris, Marseille et Martinique). Nous avons souhaité faire de notre cabinet un lieu où les avocates et les avocats sont heureux. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avons été lauréats du Barreau de Paris en 2019, prix décerné au cabinet assurant la meilleure égalité entre les hommes et les femmes et la qualité de vie au travail. Je pense pouvoir dire que lorsqu’un avocat est heureux d’arriver au cabinet le matin, il donnera le meilleur de lui-même.

Sandra Ammar : C’est pour cela qu’avec Rémi-Pierre, nous pensons avoir des valeurs de confraternité, d’humanité et d’égalité dont nous serons les porte-voix au sein du Conseil de l’Ordre. Nous nous connaissons depuis de nombreuses années et nous avons déjà pu mener des combats sociétaux ensemble. Nous sommes un binôme libre, passionné et représentatif.

Propos recueillis par Yannick Nadjingar-Ouvaev


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