Moins d’opérations et des montants investis plus faibles, ralentissement généralisé sur le marché du capital-risque

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Après un premier trimestre 2020 qui avait marqué un coup d’arrêt dans la dynamique d’investissements en France et en Europe, les résultats du premier semestre 2020 confirment le ralentissement des activités de levée de fonds. Retour sur les tendances du capital-risque au premier semestre 2020 avec le Baromètre In Extenso Innovation Croissance réalisé en collaboration avec l’Ecole Universitaire de Recherche ELMI de l’Université Côte d’Azur.

L’ « après » mois de mars, une situation qui s’installe

Signe fort du choc sur le marché du capital-risque au premier trimestre, le nombre des opérations réalisées en France continue de reculer avec une baisse globale de 16 % sur le semestre - soit 357 levées au total contre 426 sur la même période en 2019 – et une intensification du phénomène en plein cœur de la crise, sur les mois de mars (-37 %) et avril (-40 %). 

Si le dynamisme du mois de janvier avait permis de préserver les résultats du premier trimestre qui avait enregistré une très légère hausse des montants levés (+4 %), les baisses successives des mois de février (-12 %), mars (-23 %), avril (-33 %) ont façonné le recul généralisé des montants levés au premier semestre 2020. Plus encore, la promesse d’un mois de mai 2020 plus performant de 50 % qu’en 2019 est mise à mal par le recul spectaculaire des montants au mois de juin : -52 % en comparaison à 2019. 

A l’arrivée, les start-ups françaises lèvent près de 2,7 milliards d’euros au premier semestre 2020 soit 11 % de moins qu’en 2019. La progression sur l’intervalle premier semestre 2018/premier semestre 2020, + 53 %, vient toutefois nuancer le tableau et donner un éclairage nouveau à l’étude de l’impact de la crise sanitaire sur le marché de la levée de fonds. Ainsi, au 30 juin 2020, les start-ups françaises ont levé plus de 80 % des montants totaux enregistrés sur l’année 2018 (soit 3,2 milliards d’euros).

Le constat est similaire en Europe où le nombre de deals (2117) recule de 20 % en comparaison à la même période en 2019 - avec des taux autour de -30 % par mois à partir de mars – accompagné d’une baisse globale des montants levés (-9 % pour atteindre les 14,5 milliards d’euros levés) qui s’accentue à partir du mois de mai (-19 %) et accélère au mois de juin (-31 %). 

Scénario miroir entre les très jeunes pousses et les entreprises matures

Déjà perceptible sur le premier trimestre, l’impact de la crise sur les très jeunes pousses françaises (- de 3 ans) est renforcé par les mauvais résultats du mois d’avril qui enregistre un recul de 60 % du nombre des opérations en comparaison à la même période en 2019. Dans ce contexte, celles qui réussissent à lever le font sur des tickets moyens près de 2,5 fois supérieurs à ceux de 2019 soit un ticket moyen autour de 4,2 millions d’euros au premier semestre 2020 contre 1,9 millions d’euros à la même période en 2019.

Cette percée du ticket moyen s’appuie toutefois sur les levées records de très jeunes pépites à l’instar de Kinéis, qui lève 100 millions d’euros sur le marché de l’IoT. A noter qu’en 2019, aucune entreprise de moins de 3 ans n’avait levé plus de 50 millions d’euros. 

A l’inverse, les entreprises plus matures parviennent à maintenir leur capacité à lever des fonds – avec une relative stabilité du nombre d’opérations sur la période pour les entreprises de plus de 5 ans – avec toutefois un ticket moyen largement entamé par la crise. Ainsi, les entreprises de plus de 10 ans enregistrent un recul de leur tour de table moyen de près de 35 % sur la période, passant de 14,6 millions d’euros environ au premier semestre 2019 à 9,6 millions d’euros en 2020.  En cause, la part moindre du nombre d’opérations supérieures à 10 millions d’euros portées par des entreprises de plus de 10 ans : 39 % au premier semestre 2019 contre 26 % en 2020. 

En parallèle, le nombre d’opérations d’envergure décroit de manière significative avec un recul global de -41 % sur les opérations supérieures à 30 millions d’euros, marqué par la chute nette du nombre d’opérations entre 30 et 50 millions d’euros, -71 % sur la période. En Europe, la tendance s’inverse avec des opérations supérieures à 50 millions d’euros qui résistent à la crise, bien que la progression de 11 % au premier semestre 2020 soit sans commune mesure avec le bond en avant de 145 % observé entre 2018 et 2019. 

Des profils prometteurs sur un marché concentré par la Fintech et la Santé

Au cœur de la tempête, quelques catégories d’acteurs parviennent à conserver la tête hors de l’eau en France à l’instar des entreprises du secteur Food dont le nombre de levées grimpe de 25 points en comparaison au premier semestre 2019. Toutefois, malgré leur capacité de résilience – secteur Food comme Home Living qui performe avec la levée record de ManoMano et dont le nombre d’opérations augmente de 60 % en comparaison à 2019 – ces dernières sont peu représentatives d’un marché drivé par des levées de fonds en fintech et en santé qui concentrent un tiers des montants levés et 26 % du nombre d’opérations sur la période. 

« Recul généralisé des montants et nombre de levées qui s’accélère à partir du mois d’avril, coup de frein sur les investissements d’envergure et réserve des investisseurs sur les opérations portées par les très jeunes pousses qui lèvent moins souvent… Les craintes exprimées par les acteurs à la fin du premier trimestre se confirment : le marché du capital-risque a réagi de manière significative à la crise du Covid-19. Malgré ce bilan mitigé d’une moitié d’année 2020 qui restera dans les annales, certains signes – la résilience des entreprises de l’agro-alimentaire ou encore la nette augmentation des tickets moyens des jeunes entreprises - offrent la promesse d’une ère nouvelle, post Covid-19, pour la levée de fonds en France et en Europe. Reste à déterminer la distance à parcourir pour y arriver. » commente Patricia Braun, Présidente du Cabinet In Extenso Innovation Croissance. 


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