L'Intranet comme booster de la performance juridique

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Patrice Yermia, Responsable juridique au sein de la Direction Juridique Groupe de TotalEntretien avec Patrice Yermia, Responsable juridique au sein de la Direction Juridique Groupe de Total.

Quelles sont vos fonctions au sein du groupe Total et comment avez-vous été amené à vous pencher sur ces sujets ?

Je suis en charge du département "Management & Développement" au sein de la Direction juridique Groupe de Total. Cette structure, rattachée au General Counsel, a été créée en 2009 avec un double objectif : accélérer le développement de la fonction juridique dans le Groupe et favoriser l’approche "risk management". Nos missions, très transverses, comprennent notamment le développement des juristes (carrière, mobilité, formation...), la communication de la fonction juridique, le knowledge management, les relations avec notre panel d’avocats ainsi que le pilotage de projets visant à améliorer le management des risques (audits juridiques, outils de risk management...).

Au vu de l’étendue de ces missions et de la taille du Groupe, les outils de capitalisation et de communication du savoir-faire font partie de nos priorités. Nous essayons de répondre aux besoins des 400 juristes répartis dans le monde entier avec une équipe dotée de profils divers (juristes, communicants, SI, financiers...).

Chez Total, quels sont les objectifs et les apports d’un Intranet Juridique ?

Avant tout, l’intranet juridique doit faciliter le quotidien des utilisateurs, qu’ils soient juristes ou opérationnels, en leur donnant un accès rapide à l’information utile pour l’exercice de leur activité.

Il doit en outre promouvoir les meilleures pratiques et attirer l’attention sur certains risques majeurs, tout en l’orientant vers les moyens disponibles pour limiter ces risques (ressources documentaires, contrats-type, outils de sensibilisation...). Nous avons d’ailleurs récemment mis en ligne une cartographie des risques juridiques accompagnée des traitements existants.

L’accès à un panel d’avocats recommandés, à un annuaire des juristes, aux organigrammes est tout aussi indispensable.

Enfin, le Groupe Total étant présent dans 130 pays et les juristes étant répartis sur 50 d’entre eux, l’intranet doit être fédérateur et permettre l’échange et la communication. Le nom de notre intranet est "LinC", ce qui signifie "Lawyers in Connection".

Quels sont les changements majeurs par rapport aux premières expériences vécues il y a quelques années, et quels nouveaux changements/évolutions majeurs anticipez-vous ?

Au début des années 1990, j’ai eu l’occasion de participer à la construction d’outils de partage mais il s’agissait d’applications informatiques locales destinées à un nombre limité de juristes, pour répondre à des besoins classiques tels que la mise à disposition d’un contrathèque ou d’une base documentaire.

Aujourd’hui, notre intranet continue de répondre à des objectifs de capitalisation mais les aspects communication et sensibilisation sont devenus majeurs. Pour demain, les utilisateurs vont souhaiter toujours plus d’interactivité : "je reçois de l’information, je réagis, je commente et j’en donne en retour". C’est un changement de mentalité notable, alors que le juriste n’est pas forcément "partageur" de nature. En matière d’interactivité, nous développons par exemple un outil qui permettra à chaque juriste d’évaluer les prestations d’un conseil juridique extérieur.

Gestion de projet, gestion du changement, quels sont les freins et les principales difficultés rencontrées dans la mise en place de ce type d’outils ?

En énumérant les difficultés je crains d’effrayer ceux qui n’ont pas encore franchi le pas... Les difficultés vont dépendre d’abord de la complexité de l’architecture de votre système d’information, de la facilité ou non de donner un accès sécurisé dans tous les pays, de sélectionner l’information accessible à tous et celle réservée à certains...

Il convient également d’anticiper la conduite du changement en planifiant des actions de support. En outre, un intranet doit vivre et fournir de l’information fiable et mise à jour de façon permanente, et si possible en 2 langues. Ceci requiert des ressources et des compétences spécifiques.

Dans la conception, comme dans l’utilisation d’un Intranet juridique d’entreprise, faut-il dissocier les fonctions de capitalisation des connaissances et celles de suivi de dossiers et de gestion d’affaires ?

Au sein de Total, nous avons considéré que les utilisateurs Cible et les objectifs étaient différents et avons donc décidé de dissocier. Concernant le suivi des dossiers, nous avons opté pour un outil de gestion électronique de données interfacé avec notre messagerie, permettant la création de dossiers électroniques uniques alimentés et partagés entre plusieurs juristes, le tout dans des conditions de sécurité renforcées.

Comment concilier en la matière les objectifs de l’entreprise avec l’évolution des comportements des jeunes générations ?

L’accès à l’information et au savoir-faire n’est pas une question de génération. Un intranet utile, convivial, permettant de ne pas "réinventer la roue" est le souhait de tous les juristes.

En revanche, les automatismes peuvent être différents et les attentes des nouvelles générations pour bénéficier d’outils performants de ce type sont plus fortes. A la condition que certaines précautions soient respectées (fiabilité, confidentialité...) ces attentes sont parfaitement en ligne avec les objectifs de l’entreprise puisqu’elles encouragent le l’interaction, le partage et la diffusion du savoir.

Propos recueillis par Michele Zingari

A propos

jem15Cet article provient du numéro 15 de Juriste Entreprise Magazine (JEM), magazine de l'Association Française des Juristes d'Entreprise (AFJE) dont le dossier spécial est consacré au Knowledge Management.

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